Le Tour de France à Royan en 1937 (1)
Si le Tour de France 2014 ignore totalement l’ouest de la France et sa façade atlantique, Royan a été ville étape lors de sept éditions en 1937, 1938, 1939, 1958, 1966, 1968 et en 1972, il y a déjà plus de quarante ans. Le Tour découvre furtivement Royan pour la première fois en 1937 lors d’une étape divisée en trois parties.
Royan est par sa situation géographique naturellement prédisposée à accueillir le Tour de France puisque la ville est située au cœur de la façade atlantique. Les premiers Tours de France, à partir de sa création en 1903, suivent un parcours assez fidèle de l’hexagone territorial. Ils passent progressivement de six à quinze étapes. Les villes étapes ne changent pas toutes les années. Certaines villes peuvent s’inscrire dans la durée pour recevoir l’arrivée des coureurs. La grande étape atlantique est celle entre Bordeaux et Nantes entre 1903 et 1910 à l’exception de 1905 où La Rochelle est le terme de l’étape. Puis entre 1911 et 1914, c’est Bayonne - La Rochelle. Après la Première Guerre mondiale, Les Sables-d’Olonne se substitue à La Rochelle pour les Tours de 1919 à 1931 pour des étapes jusqu’à Bayonne ou Bordeaux. A partir de 1933, La Rochelle redevient le final de la remontée des coureurs en provenance de Bordeaux. L’année suivante, une nouveauté apparaît avec un contre-la-montre individuel. La 21e étape est alors divisée en deux fractions, une étape en ligne le matin (La Rochelle – La Roche-sur-Yon) suivie de l’épreuve chronométrée l’après-midi. Ceci a également comme conséquence d’offrir de nouvelles possibilités pour des villes d’accueillir une étape. Celles de la Charente-Inférieure vont en profiter. Rochefort en 1935 accueille la première fraction d’une étape, Saintes l’est l’année suivante avant le contre-la-montre de la seconde fraction de l’après-midi vers La Rochelle.
Après Rochefort et Saintes, Royan est programmée pour être le terme d’une fraction de la 17e étape du Tour de France 1937. Le journal Royan rappelle que «plusieurs tentatives les années précédentes avaient échouées. Cette année, un heureux concours de bonnes volontés a permis de profiter des excellentes relations que quelques membres du Comité d’organisation ont de longue date avec M. Desgranges (organisateur du Tour) et Machurey (chronométreur du Tour). Tout le monde a compris la grosse importance d’une manifestation qui doit nous amener un public considérable et nous faire une publicité monstre.» Royan note avec plaisir que ses «confrères Le Phare et Le Journal de Royan ont embrayé et appuient fortement sur les pédales. Ils comprennent les efforts des dirigeants et les encouragent. Tous pour un Royan plus grand et plus prospère !»
Cette 17e étape, programmée le 22 juillet 1937, est divisée en trois fractions se courant la même journée : Bordeaux – Royan, Royan – Saintes et le final Saintes – La Rochelle. Royan se félicite de cette formule car «les spectateurs de Royan seront particulièrement favorisés, puisqu’ils jouiront du privilège assez rare d’assister à une arrivée et un départ, les coureurs repartant de notre plage par équipes contre-la-montre. L’arrivée, en particulier, promet d’être magnifique. […] Les coureurs déjeuneront sur place à l’arrivée. Le départ de la première équipe sera donné 40 minutes après l’arrivée du dernier.» Quant au Journal de Royan du 27 juin 1937, il signale que «Royan s’apprête à accueillir, comme il sait le faire, les géants de la route dans le site admirable du boulevard Frédéric-Garnier où se fera l’arrivée. Nulle part ailleurs, peut-être, sauf sur les bords de la Méditerranée, cadre plus propice ne se prêtera à ce tableau éminemment spectaculaire. La petite reine longeant la côte sur près de deux kilomètres, dans ce mouvement de bielles puissantes qu’évoquent les muscles des grands champions, avec, à quelques mètres, l’écrasement éternel des vagues déferlantes ! Pour peu que le soleil se mette de la partie, il y aura là, pour tous les vrais sportifs – et ils sont nombreux dans notre contrée – l’objet d’une vision de toute beauté et d’un inoubliable souvenir.» Pour que la fête soit réussie, le service du bac est doublé afin de permettre à «nos amis du Médoc» de pouvoir venir en nombre voir le spectacle offert. La ville s’organise pour pouvoir accueillir comme il se doit l’évènement, 40 gendarmes, 10 agents de police sans compter les commissaires de course assurent le service d’ordre. Il faut alors trouver plus de 1 500 mètres de barrière pour assurer l’arrivée et la mairie s’est engagée à refaire la chaussée du boulevard pour l’occasion.
Le Journal de Royan insiste sur la publicité exceptionnelle pour la ville : «Royan sera en fête le 22 juillet. Des quatre coins de la France on entendra son nom et vanter la beauté de sa côte et l’accueil chaleureux et enthousiaste de ses habitants. Il importe que la ville ait son air et son habit des grands jours. Pavoisons hardiment.» L’accent est mis sur une organisation parfaite pour ne pas subir les affres journalistiques comme pour l’arrivée à Toulon et que «de manière à avoir, dans les années qui vont suivre, le Tour de France à Royan ce qui constitue pour notre ville une publicité absolument incomparable».
L’étape est un réel succès peut-on lire dans le Journal de Royan du 25 juillet : «Le long du boulevard Garnier et de chaque côté des barrières, la foule se presse nombreuse et les services d’ordre ont fort à faire pour endiguer le flot curieux et dépister les resquilleurs. […] La foule attend visiblement impressionnée. C’est le crépitement des bravos et des encouragements amicaux qui signaient l’arrivée. Sur la longue avenue droite le peloton s’avance. Les bravos augmentent. Ils passent devant moi. Le 1er tiers de la 17e étape est vaincu. La foule se précipite et entoure avidement les coureurs, on distingue des hommes couverts de sueur et maculés de boue, des fleurs que portent des jeunes filles.»
«Le passage de Royan est de bon augure pour les années à venir. Rien n’a été ménagé afin que tous soient satisfaits.» Tel est le cas puisque le Tour décide de reconduire l’étape de Royan l’année suivante. Mais cette fois c’est le final d’une étape entière en provenance de Nantes que les Royannais acclameront en 1938 : «Les organisateurs du tour ont montré leur bon goût en choisissant notre ville pour en faire une étape repos. Nulle autre ne pouvait mieux répondre que notre cité et présenter tout ce qui est exigible pour le repos. […] A Royan, on sait bien faire les choses. Tellement bien que l’étape essai de l’an dernier où vous passâtes comme des météores s’est transformée en étape repos. Les fanas du Tour sont légion ici. […] La publicité se fait autour du nom de Royan. On parlera de leur cité dans toute l’Europe. Ils sont heureux de vous recevoir, l’hospitalité est vertu saintongeaise.»
Appel aux lecteurs : L’auteur est à la recherche de photos sur le Tour de France à Royan pour les années 1958, 1966, 1968 et 1972. Vous pouvez les envoyer ou le contacter à l’adresse suivante : c.bertaud17@gmail.com