Livres
Anges gardiens de la mer
Se pencher sur l’histoire des sauveteurs en mer – et les 50 ans de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) – c’est également se pencher sur l’histoire de la marine. Depuis les origines, des bénévoles assument leurs fonctions au péril de leur propre vie. «Cet engagement peut étonner à une époque où le “chacun pour soi” est sans doute plus répandu», comme le précise Xavier de la Gorce, président de la SNSM. Avec une abondante et très belle iconographie, ce beau livre revient donc sur cette histoire où la solidarité n’est pas un terme galvaudé. On y apprend que Louis XIV implique les populations vivant sur les côtes, dans l’ordonnance de la marine de 1681, qui doivent surveiller et alerter les officiers de marine lors des naufrages. En 1825, la Société humaine et des naufrages (SHN) est créée à Boulogne-sur-Mer. A cette époque, les sauveteurs interviennent avec des moyens dérisoires, à l’aviron sur des canots dans des mers souvent très hostiles. Les différentes organisations de sauveteurs qui naîtront ensuite fusionneront en 1967 pour donner naissance à la SNSM afin d’améliorer les moyens mis en œuvre. Canots à moteur, sémaphores, radio, scooters des mer, hélicoptères, drones… L’auteur revient sur toutes les évolutions marquantes du sauvetage avec de nombreuses histoires, parfois dramatiques, de naufrages. Un livre indispensable aux amoureux de la mer qui savent que des anges gardiens ne sont jamais très loin en cas de problème lors de leurs sorties.
Sauveteurs en mer, Gérard Piouffre, éd. Ouest-France, 192 pages, 27,50 €
Sublime La Rochelle
La Rochelle, ville emblématique dynamique et capitale de la Charente-Maritime, est le sujet de ce très beau livre qui met en avant les photographies de Xavier Léoty, appuyées par des textes d’amoureux de la ville. Les angles abordés sont variés : patrimoine, histoire, culture, politique, vie quotidienne… La qualité de la photogravure est très soignée. Les textes apportent des petites anecdotes intéressantes. Les auteurs nous rappellent ainsi, au détour de l’inscription ancienne «rue du Raisin», le passé vinicole prospère de la ville jusqu’à la fin du xixe siècle et la crise de phylloxéra. On y apprend aussi que La Rochelle était le quatrième port de pêche avec 25 000 tonnes de poisson vendues en 1964, que l’aquarium reçoit 800 000 visiteurs par an, que l’on peut voir d’anciennes enseignes gravées sur des murs de la rue du Minage, la seule qui a conservé ses arcades de chaque côté… De nombreux clichés témoignent de la vie quotidienne : l’incendie de l’hôtel de ville le 28 juin 2013, la vie du port, les figures du rugby du Stade rochelais, les politiques qui se croisent aux Universités d’été du PS, les artistes sur la scène des Francofolies et Jean-Louis Foulquier… On reconnaîtra à Xavier Léoty un grand talent dans son travail de photographe, talent que l’éditeur a réussi à mettre en valeur dans cet ouvrage.
La Rochelle, Xavier Léoty, éd. La Geste, 240 pages, 29,90 €
Le Golden Globe, il y a 50 ans
En 1968, neuf marins s’élançaient depuis les côtes anglaises pour un tour du monde en solitaire et sans escale : le Golden Globe. En 2018, 50 ans plus tard, une trentaine de marins partiront le 1er juillet des Sables-d’Olonne (le départ n’ayant pu être organisé en Angleterre suite au Brexit) pour une course anniversaire dans les mêmes conditions : sans GPS, sans pilotes électriques et sur des bateaux de seulement une dizaine de mètres.
A cette occasion, Glénat ressort l’excellent livre de Peter Nichols, paru en 2002, qui revient sur la course originelle qui fut une invraisemblable aventure aux nombreux rebondissements. Certains n’avaient même pas d’expérience de la navigation en solitaire. Abandons, naufrage et même suicide – celui de Donald Crowhurst qui avait tenté de falsifier ses performances – marqueront la course dont seul Robin Knox-Johnston passera la ligne d’arrivée après 313 jours en mer car Bernard Moitessier, en bonne position pour gagner, décidera de ne pas s’arrêter afin de poursuivre sa route au large…
Ce livre se lit comme un roman que l’on a du mal à reposer tant les personnages et les situations sont extraordinaires. Pour une première course, ce Golden Globe fut vraiment épique. Peter Nichols a le talent pour nous la faire revivre de l’intérieur.
Golden Globe, Peter Nichols, éd. Glénat, 384 pages + 16 pages de photos d’époque, 22 €
Golden Globe Race 2018 : http://goldengloberace.com/fr
Retour sur l’odyssée tragique de Crowhurst
A l’occasion des 50 ans du Golden Globe et alors qu’un film sort sur l’incroyable aventure du navigateur Donald Crowhurst, Le Jour de mon retour, l’éditeur Arthaud réédite le livre écrit par deux journalistes du Sunday Times, le journal anglais sponsor de la course au large. Il sort initialement en 1971, soit deux ans après la découverte du drame et après une enquête journalistique minutieuse à la rencontre de tous les protagonistes, dont sa femme Clare.
L’histoire est à peine imaginable : un homme d’affaires en mal de publicité s’engage dans une course en solitaire sans escale à bord d’un trimaran de 12 mètres construit au dernier moment avec lequel il n’a jamais navigué. Les enjeux sont tels – il a hypothéqué sa maison, sa société se porte mal – qu’après de nombreuses avaries, plutôt que d’abandonner, il s’enferme dans la spirale infernale du mensonge, faisant croire qu’il continue la course alors qu’il fait des ronds dans l’eau dans l’Atlantique. Son bateau sera retrouvé sans son capitaine au milieu de l’océan, les documents retrouvés faisant penser que, se voyant démasqué, il a préféré se suicider.
Ce livre passionnant revient dans le détail sur cet homme complexe et son aventure dramatique.
L’étrange voyage de Donald Crowhurst, Ron Hall et Nicholas Tomalin, éd Arthaud, 400 pages, 19,90 €
Champion du large
«Ma vie va vite», comme le dit François Gabart, skipper de Macif, impressionnant trimaran de 30 mètres, en introduction à son livre qui sort au format poche. Effectivement, ces dernières années, il va vite : détenteur du record du tour du monde en solitaire en décembre 2017, de la Transat anglaise en 2016, de la Transat Jacques-Vabre en 2015, de la Route du rhum en 2014 ou encore du Vendée Globe en 2013 à 29 ans… Son palmarès est impressionnant. Sorti à l’origine en 2016, François Gabart offre dans ce livre un témoignage sur le monde de la navigation à voile et sur sa vie, depuis sa petite enfance jusqu’à la Transat anglaise. Il aime les courses en solitaire sur multicoques et, à propos du record du tour du monde de Francis Joyon en 57 jours en 2008, il écrit : «J’espère qu’il sera battu prochainement…» Il le sera fin 2016 par Thomas Coville en 49 jours puis par lui-même en 42 jours en 2017.
François Gabart n’a pas fini de nous raconter ses aventures en mer.
Rêver large, François Gabart, éd. Arthaud Poche, 304 pages, 6,90 €